Nouveau projet de recherche de l’IML : pour un barter transfrontalier au Pays Basque.
L’Institut des Monnaies Locales lance un important projet de recherche qui étudiera la faisabilité d’un barter transfrontalier au Pays Basque. Les travaux de ce programme intitulé « Eusko-Barter » seront menés par un groupe de chercheurs international et interdisciplinaire, avec l’apport de différentes institutions.
Un barter est un système d’échange interentreprises qui permet aux entreprises d’un territoire d’échanger entre elles sans toucher à leur trésorerie en euros. Elles utilisent pour cela une monnaie complémentaire propre au réseau, le barter, qui est à parité avec l’euro (1 barter = 1 euro), mais n’est pas convertible en euros, contrairement aux monnaies locales complémentaires comme l’Eusko, la Gonette, la Roue, etc.
Les barters ont été promus par le gouvernement en 2013, à travers un guide des échanges interentreprises de biens et de services. Le Pays Basque aurait-il intérêt à se doter d’un tel outil, qui permettrait de renforcer sa résilience économique et de créer une dynamique transfrontalière, en tissant du lien entre le Pays Basque Nord (côté français) et le Pays Basque Sud (côté espagnol) ?
Des exemples probants de barter existent : le Wir, lancé en Suisse en 1934, réunit plus de 50 000 PME, et le Sardex, en Sardaigne, lancée en 2010, a connu aussi un très grand succès. Aux États-Unis, une multitude de barters locaux existent pour soutenir la création et le développement d’entreprises, grâce à des apports en trésorerie significatifs, et à la création de réseaux d’échange.
Un barter apporte aussi des solutions aux entreprises en période de tensions sur le crédit, ou de hausse des taux d’intérêt, c’est pourquoi le WIR a été créé après la crise de 1929 et le Sardex après celle de 2007. En échangeant grâce à ce système de financement alternatif, les entreprises de toutes tailles, y compris industrielles, réduisent leurs frais financiers et s’ouvrent de nouvelles opportunités d’échanges, plus locales. Ce qui est favorable à la transition écologique.
Une recherche transfrontalière.
Le point de départ du projet de recherche sur un barter au Pays Basque est une volonté d’apporter du soutien aux entreprises du Pays Basque, qui sont pour l’essentiel de petites et moyennes entreprises, à travers un nouvel outil efficace face à des crises qui pourraient les mettre en difficulté. C’est en effet lors de la crise du Covid, en 2020, que l’institut de recherche et de formation Bihar – Institut des Monnaies Locales et le Comité de pilotage de l’Eusko, la monnaie locale du Pays Basque Nord, ont décidé de réfléchir à la faisabilité d’un barter.
Les chercheurs devront étudier la faisabilité juridico-économique d’un barter transfrontalier, et les possibilités de rendre ce barter compatible et/ou complémentaire avec l’Eusko, ce qui n’a rien d’évident, l’Eusko étant reconvertible en euros, et pas les barters.
Ce projet a d’emblée été pensé en perspective transfrontalière, car le tissu économique du Pays Basque Nord (Communauté d’Agglomération Pays Basque) n’a pas à lui seul l’étendue et la diversité d’entreprises nécessaires au développement d’un barter. La recherche va donc se positionner à l’échelle des territoires de la Communauté d’Agglomération Pays Basque et des Communautés autonomes d’Euskadi et de Navarre. Il bénéficie du soutien du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, de la Communauté d’agglomération Pays Basque et de la Diputación de Gipuzkoa.
Une équipe pluridisciplinaire.
La première phase de cette recherche, de juin 2022 à juillet 2023, correspondra à une phase d’étude de faisabilité. Elle permettra d’étudier différents types de barters déjà en circulation, et différents projets n’ayant pas réussi à se développer, afin de tirer les leçons de ces échecs. Elle dessinera ensuite les différents scénarios envisageables pour la constitution d’un barter transfrontalier au Pays Basque, qui pourrait intéresser bien d’autres régions transfrontalières en Europe.
Pour mener à bien la première phase de recherche de ce projet, Bihar – Institut des Monnaies Locales a réuni, grâce au soutien une équipe de recherche pluridisciplinaire, transfrontalière, et même internationale :
- Bihar – Institut des Monnaies Locales : Xabi Larralde, Docteur en économie, et Jean-Roch Guiresse, ingénieur en informatique, ancien Directeur de l’école d’ingénieur ESTIA, à Bidart.
- Équipe de recherche du programme MoLoNA (Monnaies locales de Nouvelle-Aquitaine, porté par la MSHA) : Yannick Lung, Professeur émérite, économiste spécialisé en économie industrielle, GREThA, Université de Bordeaux-CNRS ; Fabienne Pinos, Maître de conférences en sciences de gestion à l’UPPA de Bayonne.
- Laboratoire MINTS (Monetary Innovation, New Technologies, and Society) du Centre de Recherche Baffi-Carefin de l’Université Bocconi de Milan : Massimo Amato, Professeur à l’Université de Bocconi, économiste et spécialiste du Sardex.
- Centre MIK (Mondragon Innovation & Knowledge) : Oier Onaindia, enseignant-chercheur au département Économie et finance de l’Université de Mondragon.
- Université publique de Navarre (UPNA) : Carlos Vilches, sociologue, spécialisé notamment dans les méthodes de participation citoyenne en matière de projets de développement et d’urbanisme.
- Centre de recherche GEZKI de l’Université publique de Saint Sébastien (EHU) : Itziar Villafañez, juriste.
D’autres acteurs seront également associés au projet.
La CCI de Bayonne Pays Basque réalisera un diagnostic des secteurs économiques susceptibles de constituer une base de démarrage et de développement d’un barter à l’échelle transfrontalière. L’association Hemen, un acteur historique du développement économique en Pays Basque, interviendra dans les démarches en direction des entreprises nécessaires à la préparation d’une phase 2 de la recherche. Et l’avocat au barreau de Paris Hervé Pillard, spécialisé en droit financier, réalisera un audit concernant les possibilités juridiques de constitution d’un barter transfrontalier et sur les modalités envisageables d’articulation avec la monnaie locale Eusko.
Nous suivre